« Elles
existent »
pièce unique 2004
tous
droits de reproduction réservés sur tous supports
« -
Bon, alors reprenons : dans la nuit du 13 au 14, Monsieur Barbier surprend
un individu en train de tagger le mur extérieur de sa propriété, au 38 de la
rue Lecourt. Il l’interpelle ; l’homme s’enfuit. Car il s’agit très
certainement d’un homme, que Monsieur Barbier décrit ainsi dans sa
déposition : “ environ 1m80, portant des baskets, un jean et un sweat
avec la capuche rabattue sur la tête ”. Si bien qu’il n’a pu voir le
visage de l’homme en question. Signalons que cette plainte pour dégradation de
sa propriété est la quatrième que Monsieur Barbier dépose en moins de trois
mois. Il semble que ce soit le même individu qui ait opéré à chaque fois ;
pour preuve la couleur des graffitis - toujours bleue - et la teneur des
messages... Je vous les cite, voyons, voyons... Oui,c’est ça. En mars :
“ Ta femme est une salope ! ” ; un mois plus tard :
“ Elle peut aller se faire enculer ” ; et pour finir, il y a
moins de quinze jours : “ Elle suce pas mal pour une
bourgeoise ”. Oui, c’est vulgaire, je ne vous le fais pas dire. Vous en
pensez quoi ?
-
...
-Moi
aussi. Peu importe. Quel que soit le sens du message, je vous rappelle qu’il
est strictement interdit par la loi de dégrader le bien d’autrui de cette
façon. Vous ne dites rien ?
-
...
-Comme
vous voulez. Je disais donc, dans la nuit du 13 au 14, Monsieur Barbier, qui
rentrait chez lui sur le coup d’une heure du matin, surprend et met en fuite le
tagger. Celui-ci n'a eu le temps d'écrire qu'un seul mot : "Elle". Un
mot tout ce qu'il y a de plus bleu, vous vous en doutez.[...] »
Extrait
de « Elles existent »Emmanuelle Domin